D'un Montmartre l'autre

Ce n’est pas « encore » un livre sur Montmartre, c’est LE livre de Montmartre, raconté par ceux qui le vivent au quotidien depuis plus d’un siècle. Un rendez-vous avec nous-mêmes, pour oublier les rendez-vous ratés, retrouver les baisers volés.
Une fidélité, certes, mais dans le mouvement. Un regard dynamique pour conjurer l’immobilisme du souvenir. Un souvenir qui doit être telle une chrysalide qui sortirait chaque jour de son cocon. Le texte, c’est celui de François Pedron, du boulevard de Clichy depuis toujours.
Le regard, c’est celui de Dominique Chauvat, de la rue Gabrielle depuis toujours.
Le souvenir, c’est les cartes postales semées par l’histoire et qu’elle a ramassées comme les petits cailloux du Petit Poucet. Parce que Montmartre ce n’est pas une série de poncifs, mais le théâtre des multiples splendeurs des vies quotidiennes.
Montmartre c’est d’abord des Montmartrois.
Ceux du temps de Gambetta quand il inventait la République dans les années 1870.

Puis ceux que Modigliani et Renoir ont croisés et aimés. Puis ceux qui ont découvert l’électricité, l’eau sur l’évier, la pression sur le zinc.
Puis nous, et tous ceux qui viennent nous regarder. Quelques millions de touristes venus de New York, de Tokyo, de Madrid, de Shanghai, de Rome, de… Paris.
Dominique Chauvat témoigne que Montmartre est un corps vivant. Elle a retrouvé ces premières photos qui ont participé à la légende de la Butte, qui sont devenues des cartes postales que l’on s’arrache mais que l’on oublie dans un tiroir. Puis elle les a comparées : elle a noté ce qui a changé, ce qui est intact, ce qui n’existe plus, ce qui a été inventé. Ce n’est pas un jugement, c’est une rencontre chaque jour renouvelée. Son objectif « grand angle » nous éclaire avec autant de passion que de modestie. Les murs prennent la parole.
Et, puisque nous sommes à Montmartre, les peintres sont au rendez-vous. Comme toujours, ils nous apportent la couleur, une vision qui nous entraîne, qui nous transporte D’un Montmartre l’autre. Aussi bien les stars comme Toulouse – Lautrec, Renoir ou Van Gogh, que Marcel Leprin qui s’est brûlé dans nos rues, ou Félix Ziem qui a vécu soixante ans rue Lepic. Ou des très contemporains comme Nelly Harel, tendre révolutionnaire.
La précision du noir et blanc joue ainsi avec la séduction de la couleur, pour être plus proche de la vie. Cet « assemblage », comme on le dit d’un grand cru, garantit des rencontres inattendues à chaque coin de rue.